Dans quatre décisions non encore publiées au jour de notre brève, la Commission de l’Union Européenne vient de sanctionner quatre fabricants de produits d’électronique grand public, informatiques et électroménagers, pour avoir imposé des prix de revente fixes ou minimaux à leurs détaillants en ligne. Les pratiques en question sont intervenues, de manière variable selon les fabricants, au titre de la période 2011 à 2015.
Selon le communiqué de presse de la Commission du 24 juillet 2018, les interventions de ces fabricants dans la fixation des prix ont restreint la concurrence effective par les prix entre détaillants et ont débouché sur une hausse des prix. Ces pratiques ont été relevées dans certains Etats-Membres, dont la France ou l’Allemagne.
Les quatre fabricants se mettaient notamment en contact avec les détaillants en ligne qui vendaient leurs produits à des prix peu élevés. Si ces détaillants ne se conformaient pas aux prix demandés par les fabricants, ils s’exposaient à des menaces ou sanctions, telles que la cessation des approvisionnements.
A raison de l’usage d’algorithmes de fixation de prix qui adaptent automatiquement les prix de détail aux prix demandés par les concurrents, les restrictions sur les prix imposés aux détaillants en ligne appliquant des prix peu élevés avaient, de manière générale, un plus large impact sur le niveau général des prix en ligne des produits concernés.
Au-delà des prix de revente imposés, certaines pratiques ont consisté à restreindre la capacité des détaillants à procéder à des ventes transfrontalières auprès des consommateurs d’autres Etats-Membres afin de pouvoir maintenir des prix de revente différents dans les différentes Etats-Membres, par exemple en bloquant les commandes des détaillants qui vendaient leurs produits par-delà les frontières (voir aussi sur ces questions, le Règlement (UE) 2018/302 du 28 février 2018 visant à contrer le blocage géographique injustifié et d’autres formes de discrimination fondées sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu d’établissement des clients dans le marché intérieur, applicable à compter du 3 décembre 2018. JOCE, 2 mars 2018).
Les amendes infligées aux fabricants ont été réduites de l’ordre de 40% ou 50%, en raison de leur coopération avec la Commission dans le cadre de la procédure. Elles s’élèvent, au total et tout de même, à plus de 110 millions d’euros.
Ces affaires, qui s’inscrivent dans la continuité des résultats de l’enquête sectorielle de la Commission sur le commerce électronique publiée au premier semestre 2017, doivent inviter les acteurs à s’interroger sur l’opportunité d’autocontrôles dans l’usage de certains nouveaux outils de veille concurrentielle ou de tarification algorithmique.
Le sujet intéresse en effet aussi bien la Commission comme cela ressort du discours prononcé à Berlin en mars 2017 par la Commissaire à la Concurrence, que les Autorités Nationales de Concurrence, et au premier plan les Autorités française et allemande (Communiqué du 19 juin 2018 : L’Autorité de la concurrence française et le Bundeskartellamt allemand lancent un projet conjoint sur les algorithmes et leurs enjeux pour l’application du droit de la concurrence.).
Jean-Michel Vertut – Avocat