Loi EGalim : l’encadrement des promotions et la terminologie promotionnelle dans l’alimentaire décryptés par la DGCCRF.

Dans la lignée de la Loi EGalim et de l’article 3 de l’ordonnance du 12 décembre 2018, la DGCCRF a publié le 5 février 2019 ses lignes directrices relatives à l’encadrement des promotions pour les produits alimentaires et l’interdiction du terme « gratuit ».

Elle y explique comment ces nouvelles règles en matière de limitation des offres promotionnelles seront mises en œuvre par ses services.

Cette grille de lecture était attendue par les fournisseurs et les distributeurs espérant à tout le moins, quelques premières clarifications, notamment sur le nouveau dispositif de plafonnement des promotions en valeur et en volume. Qu’en retenir, entre autres ?

SUR L’ENCADREMENT DES PROMOTIONS

Encadrement en valeur :

On rappelle que les avantages promotionnels, le cas échéant cumulés, pour un produit déterminé, ne peuvent pas dépasser 34% du prix de vente au consommateur ou à une augmentation de la quantité vendue équivalente.

A la seule lecture des tracts promotionnels édités par les enseignes, les consommateurs auront par exemple déjà relevé le taux précité, qui n’a d’ailleurs rien d’un taux « rond », lorsque la réduction de prix consentie atteint le maximum légal autorisé.

L’encadrement en valeur ne concerne que les offres portant sur un produit déterminé, dont le prix est annoncé en baisse par le distributeur par rapport au prix de vente au consommateur, ou dont la quantité est augmentée par rapport au conditionnement habituel sans augmentation de prix correspondante. Ces dispositions s’appliquent donc aux seules annonces de réduction chiffrées.

Saluons le parti pris pragmatique de l’Administration qui dresse, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, une liste non exhaustive d’opérations promotionnelles entrant ou non dans le champ d’application de cette règlementation.

Entrent en tout état de cause dans le champ d’application de l’encadrement en valeur.

  • Les offres avec annonce d’une réduction de prix chiffrée : ex. « moins X% » ;
  • Les offres assorties d’une augmentation de quantité offerte : ex. du type « dont X% offert » ou « plus X% offert » ou « 2 + 1 » ;
  • Les avantages de fidélisation ou de cagnottage affectés à un produit : ex. « X% du prix du produit cagnotté sur la carte de fidélité du magasin » ;
  • Les bons de réduction accordés par les fournisseurs sur un produit déterminé (…) ex : « X centimes déduits » ou « X centimes remboursés ».

Dans le cas où un même produit bénéficierait de manière cumulative de plusieurs offres, la réduction de prix cumulée dont bénéficiera le consommateur ne pourra excéder 34% du prix de vente. Dans cette hypothèse, il revient donc au distributeur de prendre en compte l’existence d’un éventuel avantage octroyé par le fournisseur avant de mettre en place une offre promotionnelle. La communication entre les départements marketing, via le cas échéant les comptes clés, est de ce point de vue nécessaire.

N’entrent pas, en revanche, dans le dans le champ d’application de l’encadrement :

  • Le cagnottage non affecté à un produit : ex. obtention d’un montant de 10 euros sur la carte de fidélité si le montant total des produits achetés à une date particulière dans le magasin ou sur un rayon donné est supérieur à 50 euros ;
  • Les pratiques de prix présentés comme avantageux pour le consommateur sans annonces de réductions de prix chiffrées mais avec des annonces littéraires du type « prix choc », « prix bas » ;
  • L’offre d’un produit différent, y compris alimentaire, pour un ou plusieurs produits identiques achetés (vente avec prime) ;
  • Les avantages promotionnels portant sur des produits périssables dès lors qu’ils sont menacés d’altération rapide, à condition que l’avantage promotionnel ne fasse l’objet d’aucune publicité ou annonce à l’extérieur du point de vente.

Attention sur ce dernier point : Il appartiendra au distributeur de prouver aux services de contrôle que des produits étaient menacés d’une telle altération par tout moyen à sa disposition. Pour l’heure, pas de plus amples positions de l’Administration sur les produits festifs et/ou très marqués d’un point de vue saisonnier, mais sans pour autant menacés d’altération rapide (ex. les chocolats à Noël… voire même le Père Noël en chocolat). Chacun se fera son opinion, au vu de la lettre du texte.

Encadrement en volume :

On rappelle que l’ordonnance de décembre dernier prévoit également que les avantages, accordés par le fournisseur ou par le distributeur, doivent porter sur une quantité de produits ne représentant pas plus de 25 % d’un volume ou d’un chiffre d’affaires déterminé à l’avance par les parties au contrat.

Sur ce point, nous limiterons nos observations aux relations régies par la convention annuelle (en principe) à conclure au plus tard le 1er mars.

Les fournisseurs et les distributeurs devront là, s’assurer que la valeur à l’achat des produits revendus en promotion ne dépasse pas 25% du chiffre d’affaires prévisionnel. Il s’agit du chiffre d’affaires en « sell in », entre fournisseur et distributeur, et non « sell out », auprès du consommateur.

Cette option est selon nous la plus pragmatique, car le « sell in » est en principe connu des deux parties à l’achat revente. Elle réduit néanmoins mécaniquement le niveau des promotions au stade de la revente, à raison d’une assiette de calcul plus faible.

Ces chiffres d’affaires devront être inscrits par les parties au contrat, car ce sont eux qui serviront d’assiette à l’encadrement des promotions en volume.

A la différence du taux promotionnel maximum en valeur, ce taux de 25% relève de la face cachée du dispositif pour le consommateur.

SUR L’INTERDICTION DU TERME « GRATUIT »

La loi EGalim a banni le terme « gratuit » dans la promotion d’un produit alimentaire (denrées alimentaires et produits pour animaux de compagnie).

Ces dispositions étant d’application stricte, seule l’utilisation du mot « gratuit » est interdite. Ainsi et selon la DGCCRF, il semble que des termes dérivés ou synonymes, comme par exemple « offert », peuvent être librement utilisés par les opérateurs.

Les consommateurs que nous sommes auront d’ailleurs déjà observé la mutation lexicale qui s’est récemment opérée à ce sujet, notamment dans les nouveaux tracts de la Grande Distribution de ce début d’année.

Les messages du type « 2 + 1 gratuit » ou « 3 dont 1 gratuit », ont fait place aux accroches du type « 2 + 1 offert », « 3 dont 1 offert » ou, plus recherché « -100% sur le 3e ».

Au plan des contrôles, les opérateurs seront rassurés de relever que les agents en charge de vérifier le respect de cette règlementation, tiendront compte des circonstances particulières et notamment de la bonne foi des entreprises contrôlées.

A ce propos, les lignes directrices indiquent que bien que l’interdiction d’utilisation du mot « gratuit » soit en vigueur depuis le 2 novembre 2018, le fait que des emballages comportant cette mention aient été fabriqués avant cette date, pourra par exemple être pris en compte.

Même si l’Administration a pu laisser entendre qu’elle ferait preuve de pédagogie en période de début d’application de la Loi, la fin de son silence prudent sur cette question est appréciée. C’est mieux quand c’est écrit. Avec toutes les réserves qui s’imposent, la mise au pilon où le restickage des emballages n’auraient pas donc été – ou si cela n’est point trop tard ne seraient pas – les seules alternatives.

Jean-Michel Vertut – Avocat