Fin des négociations annuelles et signature des accords au 1er mars : un soulagement en trompe l’œil.

C’est enfin signé, et souvent dans les dernières heures de février, voir même vendredi 1er mars au soir : le week-end aura été bien mérité pour les responsables Grand Comptes et leurs acheteurs.

Boucler ses négociations commerciales au 1er mars, avec signature de la convention annuelle pour l’année qui s’annonce est en effet à la fois une obligation légale, mais encore une source de soulagement tant pour les responsables commerciaux côté fournisseurs, que pour les acheteurs côté distributeurs. Mais il y a tout de même un après…

Passé le 1er mars, le traitement des affaires courantes et le suivi de l’exécution de l’accord initial peut malheureusement conduire à reléguer au second plan les problématiques de révision de cet accord lorsque les parties, au travers de leur pratique quotidienne, procèderont de fait à des modifications ou à des adjonctions à leur convention initiale, sans pour autant formaliser ces évolutions.

On songe par exemple à la prévision en cours d’exercice, de services supplémentaires à rendre par le distributeur, à la révision du contenu des services initiaux ou de leurs prix, au contenu du référentiel, à l’octroi d’une ristourne conditionnelle de fin d’année alors que l’objectif de chiffre d’affaires à réaliser n’a pas été pleinement atteint à raison du défaut de livraison de certains produits commandés, du recul général du marché etc.

Cette absence de formalisation peut être le résultat d’une méconnaissance des règles applicables au-delà de la seule nécessité de « signer » au plus tard au 1er mars, d’une certaine indolence des parties passée la période de crispation des mois de négociation précédents, voire d’une confiance dans l’interlocuteur d’en face sur la mise en œuvre d’engagements pris en cours de relation, par téléphone ou lors d’une réunion de suivi commercial.

Au plan de la forme d’abord, les parties passée la date fatidique du 1er mars, doivent songer à prévoir des avenants à leur convention en cas de modification de l’accord initial. Il existe sur ce sujet un enjeu en droit des pratiques restrictives de concurrence, s’agissant de la régularité formelle de la convention qui doit continuer à retranscrire fidèlement même après le 1er mars et sur toute sa durée, l’accord des parties, sous peine de sanction administrative en cas d’infraction, mais encore en droit des obligations.

Au plan du fond et de l’évolution du contenu de la négociation commerciale ensuite, la renégociation notamment tarifaire, entre fournisseurs et clients de la grande distribution, n’est pas exempte d’un certain cadrage, alors que les réouvertures de négociations, passées la signature des accords commerciaux annuels, sont de plus en plus fréquentes.

Les parties, qui s’estiment à tort et trop souvent libérées des contraintes règlementaires passé le 1er mars, seront donc avisées de ne pas remiser leur accord initial jusqu’à la fin de la période contractuelle, et de songer à le réactualiser en cas d’évolution des conditions initialement convenues.

Jean-Michel Vertut – Avocat

 

Pour approfondir le sujet sur cette problématique, voir sous l’onglet Publication, dans la rubrique Autres publications,  mes deux contributions à la Revue Lamy de la Concurrence des mois d’avril 2017 et de juillet/août 2018.

Sur la forme de l’accord des parties : Le formalisme de l’article L. 441-7 et la preuve de la modification de l’accord des parties.

Sur le fond de l’accord des parties : Réouverture des négociations tarifaires en cours d’exercice : la cour d’appel de Paris balise la pratique des demandes de baisses de prix ou de « budgets » additionnels.