Quelle est la marge de manœuvre dont disposent les distributeurs pour obtenir de leurs fournisseurs de MDD, une analyse de leurs coûts de revient par postes et sous-postes, c’est-à-dire des informations susceptibles d’être protégées par leur secret des affaires ? L’obtention de ces informations est-elle licite et dans l’affirmative, dans quelle mesure ? Se refuser à divulguer ces informations pour un fournisseur, afin de protéger son savoir-faire, est-il un motif de rupture du contrat avec son distributeur ?
La Commission d’Examen des Pratiques Commerciales tente de répondre à ces questions dans un avis du 25 octobre dernier (Avis n° 18-9 relatif à une demande d’avis d’un professionnel portant sur la légalité d’une pratique mise en œuvre dans le cadre de l’achat de produits MDD).
La problématique est approchée au plan de l’articulation de ces demandes de communication avec certaines règles en matière de pratiques restrictives de concurrence (notamment menace de rupture brutale des relations commerciales, déséquilibre significatif, rupture des relations commerciales établies) ou de la protection du secret des affaires issu de la Loi du 30 juillet 2018.
En arrière-plan de la saisine de la Commission, l’on devine la préoccupation pour les fournisseurs, au-delà de la protection de leur savoir-faire, de l’hyper-transparence de leurs coûts de production ainsi que de la construction de leurs prix, et de la préservation de leur part de secret, indispensable pour la défense de leurs positions tarifaires dans la négociation et de leurs marges.
Finalement, cet avis encadre le droit de regard du distributeur sur son fournisseur au plan de la comptabilité de gestion, et vise à concilier les intérêts de chacun. Il est, peut-être, une invitation à repenser la problématique de la transparence dans les négociations de commerciales de contrats MDD et même au-delà.
En effet, la nécessité de préserver le secret des affaires se rencontre aussi dans d’autres types de négociations commerciales.
On songe notamment aux renégociations de prix visées à l’article L. 441-8 du Code de commerce, pour certains produits agricoles ou alimentaires (y compris d’ailleurs en MDD), qui prévoit que la renégociation de prix est conduite de bonne foi, dans le respect du secret des affaires.
On pense aussi à celles des contrats de partenariats, visant au sein de la chaîne d’approvisionnement alimentaire, à une création et une répartition plus équilibrée de la valeur ajoutée, bien que la loi EGALIM, prônant la construction des prix de l’amont de la filière à partir de ses coûts, puisse pousser à une recherche accrue de visibilité sur ces derniers avec, le cas échéant, certains effets pervers.
Pour en savoir plus, retrouvez sous la rubrique publication, mon commentaire paru à la Lettre de la Distribution du mois de décembre 2018 ainsi que, de manière plus détaillée, à la Revue Lamy de la concurrence du mois de janvier 2019.
Jean-Michel Vertut – Avocat